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Zé Té dessine 

 

Le nom de l'association joue sur l'équivoque : entre le zozotement de la langue et la référence à Zétès de Pascal Quignard.

Zétès est à la fois le deuxième volet d'un ouvrage de Pascal Quignard intitulé « Lycophron et Zétès » et le pseudonyme sous lequel il a publié ces poèmes dérivés du grec, notamment Alexandra.

Zétès traduit « celui qui cherche ». Surtout, Zétès présente un auto-portrait de l'écrivain en Cassandre.

Cassandre est le personnage mythologique dont les prophéties ne sont pas crues, celle dont la parole est vaine.

Alexandra révèle un récit pour la parole qui fait défaut, la parole qui rapporte l'irreprésentable et l'inaudible, la parole obscure.

La dimension tragique du poème grec ne concerne pas tant le destin des Troyens et des Grecs annoncé par Cassandre que le rapport entre logos et vérité. Cassandre incarne la puissance impuissante de l'écrit.

 

Quignard a souvent évoqué sa passion pour les récits premiers du monde.

En revivifiant les textes anciens, il nous permet d'hériter d'une extraordinaire bibliothèque plurilingue et polymorphe : la présence intense du latin, du grec, avec lesquels le français finit par ne faire qu'une langue. Pour lui, les œuvres d'aujourd'hui sont héritières de celles qui les ont précédées; la lecture s'approfondit dans cette traversée des âges. De même pour les images dont il explore la fascination (fresques de Lascaux, Pompéi, estampes japonaises ou œuvres contemporaines).

Dans le passage du grec au français, le creusement de la langue éclaire le rapport énigmatique -silencieux et bavard, physique et abstrait - de l'homme à la langue. Traduire pour Pascal Quignard, ne consiste pas à éclairer le sens d'un texte mais plutôt à traverser le mythe pour accéder au muthos, et au-delà au mutique. À lever le voile du logos (la signification) pour découvrir le tonos, le rythme, la sensation.

La page est ultime voile comme l'est le dessin. Le désir de voir et de savoir y demeure célé.

Zétès est le nom d'un chercheur de la Toison d'Or, compagnon de Boutès le plongeur.

Zétès, l'écrivain en Cassandre, reste sourd aux discours dominants, il écoute le chant archaïque, maternel, maritime. Récalcitrant, il préfère à la règle le conte, le mythe, le songe.

Pour signer certains textes, Quignard a pris ce nom emblématique: Zétès, celui qui cherche et ne préjuge de rien.

 

N'est-ce pas l'attitude qu'adopte tout thérapeute face à un dessin d'enfant ? Chercher et ne préjuger de rien ? Retrouver l'archaïque dans une traduction littérale impossible ?

Ne sommes nous pas, dans la tentative d'interprétation du dessin d'enfant, des Zétès qui s'ignorent?

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